30 ans que j'arpente les couloirs des hôpitaux, 30 ans que ma vie professionnelle est tournée vers l'autre, vers le patient, vers les équipes, 30 ans que je bosse en essayant de rester fidèle à mes valeurs.
Aujourd'hui, qui s'interroge sur les salaires indécents, qui s'interroge sur le montant des retraites, qui comprend la fatigue et l’épuisement devant des directions toujours plus exigeantes, une reconnaissance de moins en moins affichée et des effectifs de moins en moins importants ?
Tenue par l'incontournable obligation de continuité des soins, les grèves et les manifestations ne servent à rien car les réquisitions sont égales aux effectifs quotidiens.
Je suis fatiguée de tous les changements, de toutes les évolutions qui font fi des valeurs de soignant. Prendre soin des patients et préserver sa dignité de soignant devient un pari très difficile.
J’en ai plein le dos de voir s’agiter les enjeux de pouvoir, se disputer les egos surdimensionnés, de voir les tire-au-flanc profiter d’un système laxiste, de ne pas pouvoir récompenser les agents assidus et disponibles, d’assister à des réunions bien souvent inutiles.
Plein le dos des injonctions paradoxales quotidiennes !
Heureusement, les instants d’émotion vécus auprès des patients, des familles et des équipes permettent de garder la foi dans le métier.
Tout cela explique peut-être pourquoi quand, dans mon entourage, un jeune réussit le concours d'entrée en IFSI (Institut de formation en soins infirmiers), je lui réponds en souriant et avec compassion : toutes mes condoléances !
Désabusée je suis !