C’est à l’occasion d’un séjour en Guadeloupe et sur les conseils de la libraire de Pointe à Pitre que j’ai acquis ce livre de Maryse Condé, prix Nobel alternatif pour l’ensemble de son œuvre. Je n’avais jamais lu cette auteure !
Il faut tenter de vivre
Résumé
Maryse Condé, dans cette très belle autobiographie, revient sur les événements marquants de la première partie de sa vie : sa rencontre avec son mari, Mamadou Condé en 1958, son parcours africain, d’abord au Sénégal puis en Côte d’Ivoire, en Guinée et au Ghana avec ses quatre enfants. Elle va découvrir la difficulté d’être guadeloupéenne en Afrique, les salaires de misère, le rejet, la jalousie. C’est en Afrique qu’elle va découvrir Aimé Cesaire et le concept de négritude. Concilier sa vie de mère et sa vie de femme n’a pas été de tout repos avec des difficultés à s’intégrer dans la vie africaine, pas plus que sa recherche d’un compagnon ou sa vie d’enseignante mal aimée. Elle est perçue comme une étrangère malgré ses origines antillaises. Sa rencontre avec Richard Philcox va l’amener à devenir écrivaine.
Mon avis
Les biographies m’intéressent toujours beaucoup mais, même si j’ai beaucoup aimé le style et la qualité de l’écriture, les références nombreuses à ses précédents ouvrages m’ont un peu dérangée. La vie sans fards est un vrai panorama littéraire et l’occasion pour Maryse Condé de nous parler de ses différents ouvrages et de la naissance de sa vocation d’écrivain. Les références aux événements et aux hommes politiques sont nombreuses. Je m’y suis un peu perdue d’autant que ma culture dans le domaine est plus que sommaire. J’ai touché du doigt le concept de négritude (Mouvement littéraire et politique créé par Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor), le contexte géopolitique et culturel africain des années 60, .
Cette autobiographie sans complaisance se veut la plus sincère possible, « Pourquoi l’être humain est-il tellement désireux de se peindre une existence aussi différente de celle qu’il a vécue ? ». Aussi l'auteure n’hésite pas à se décrire comme une mauvaise mère et comme une mauvaise épouse ainsi qu’à porter un jugement négatif sur certains de ses choix. Pas de pathos, juste la réalité d’une vie dure et sans concession !
Pour finir, et cela m'a beaucoup émue, j’ai aimé le combat quotidien de cette femme qui a voulu à tout prix trouver sa place de femme libre, de mère et d’épouse, ainsi que son cheminement vers l’écriture.
Maryse Condé in https://www.jeuneafrique.com/232197/culture/maryse-cond-ma-relation-avec-l-afrique-s-est-fond-e-sur-un-mensonge/
Extraits
A présent que voulait-on de moi ? Que j’adopte entièrement la culture de l’Afrique ? Ne pouvait on m’accepter comme j’étais, avec mes bizarreries, mes cicatrices et mes tatouages ? D’ailleurs s’intégrer se résumait-il à modifier superficiellement son apparence ? Baragouiner les langues ? Dessiner des rosaces dans ses cheveux ? La véritable intégration n’implique-t-elle pas avant tout une adhésion de l’être, une modification spirituelle ? Personne ne se souciait de l’état de mon esprit et surtout de mon cœur. p. 88
Dehors, parfait contraste avec la frénésie de l’intérieur, la nuit était silencieuse, impériale, pénétrable. Pas un bruit, hormis le halètement feutré de la mer. Je distinguais dans le lointain le battement d’un tam-tam. p 203