Par son style simple mais d’une grande puissance expressive, proche du dessin de presse, émaillé de légendes pleines d’humour, Riad Sattouf se situe dans la veine d’une Marjane Satrapi (Persepolis) ou d’un Guy Delisle, qui utilisent de récif décalé pour mieux faire comprendre le réel.
Dans l'Arabe du futur, le dessinateur Riad Sattouf raconte sa toute petite enfance. Fils d'une mère française et d'un père syrien, docteur en histoire, Riad, petit enfant blond, grandit à Tripoli, en Libye sous Kadhafi et en Syrie sous Hafez Al Assad à Homs en passant par la Bretagne au cours de 150 pages sous titrées « Une jeunesse au Moyen-Orient (1978-1984).
La famille Sattouf voyage beaucoup et on découvre, à travers les yeux du petit garçon, la Libye de Kadhafi où toutes les maisons sont gratuites et dépourvues de verrou, où le ravitaillement est aléatoire, les décisions politiques instables, où les femmes terminent les restes des hommes. On découvre également la Syrie d'Assad, avec ses véhicules défoncés et ses maisons jamais terminées, où il est question de petites voitures sur le carrelage, de chantiers inachevés, de propagande…
Cette fresque est le portrait tendre et cruel du père de Riad, Abdel-Razak Sattouf, syrien éduqué, laïc, admirateur des dictateurs, dont la relation à l'islam, à la politique, aux juifs est pour le moins ambigüe. Le personnage porte de nombreuses contradictions qui le rendent à la fois énervant et attachant. La mère, quand à elle n’est qu’une ombre, figure silencieuse complètement à l'arrière-plan. Les autres personnages sont justes et cruels dans leur lâcheté, leurs mensonges, leur tendresse.
J’ai été captivée par ce récit qui offre, en voix off, un angle original pour faire comprendre l’histoire
de ces pays du Moyen Orient. Il se lit comme un documentaire, tant à certains moments Riad Sattouf est généreux de détails sur ce qu’il découvre en Lybie ou en Syrie.Un des best seller de la BD cette année.
(Le grand journal, 26/12/2014)